Et vous passerez comme des vents fous

Clara Arnaud

Éditions Actes Sud

La part de l’ours

Avec ce titre magnifique, Clara Arnaud nous démontre ce que devrait être la place de l’homme dans la nature : une place parmi d’autres.

J’ai particulièrement aimé que deux histoires se chevauchent sur ce territoire du Couserans dans les Pyrénées ariègeoises, celle de Jules adolescent qui au printemps 1887, ayant guetté le réveil de l’ours et son éloignement de la tanière, y pénètre pour subtiliser une oursonne. Dès lors son rêve peut s’accomplir, il sera montreur d’ours et fera le tour du monde avec sa bête. Il réalisera son rêve, mais…

Dans ce qui a été sa maison, Gaspard et sa famille se sont installés, presque quatre décennies plus tard.

Pour celui-ci c’est un retour au pays et une reconversion, Jean vieux berger au savoir ancestral veut faire de lui son successeur, il lui reconnait de vraies valeurs.

Jean est un véritable mentor pour Gaspard. Il a la sagesse et la nuance.

L’ours est toujours au cœur des préoccupations de ce territoire.

Il ne fait plus rêver, il a été réintroduit sans l’avis des bergers et encore moins leur aval.

La cohabitation n’est pas simple.

« Si t’écoutais un peu les anciens, tu saurais que l’ours, c’est pas un enfant de chœur ! Alors moi, je suis pas pour tous les buter, mais on peut pas les laisser se servir dans les troupeaux, sinon c’est open-bar… »

Alors lorsque Alma débarque et que les habitants apprennent qu’elle est éthologue, venue observer les plantigrades, elle devient une cible. Elle cristallise, malgré elle tout ce que ceux qui vivent sur ce territoire et qui font vivre celui-ci, ont de hargne, voire de désespoir. La bureaucratie, depuis plus d’un demi-siècle, leur fait subir : une saignée.

En effet ces diktats sont faits par ceux qui ne connaissent pas le cœur des problèmes du territoire.

Mais en prenant Alma pour cible ils se trompent car dans l’organisation qui l’emploie elle est plutôt hors cadre, passionnée par son métier mais toujours à étudier l’animal pour trouver le juste équilibre.

Clara Arnaud sait de quoi elle parle, j’ai vécu l’estive et le savoir pluriel nécessaire pour qu’elle soit réussie. Les changements climatiques y sont prégnants, la perte du savoir ancestral en filigrane, car en effet, les jeunes qui restent n’ont pas tous ce besoin de savoir, ils sous-estiment les besoins primordiaux.

L’ours idolâtré ou diabolisé n’est que la partie visible des problèmes de la préservation de la nature. Trouver le juste équilibre pour occuper la terre, cohabiter, , l’homme n’est pas supérieur aux autres espèces.

Un roman qui se vit, extrêmement documenté, sans lourdeurs, des personnages bien incarnés. Une écriture subtile pour une réflexion profonde : dans quel monde désirons-nous vivre ?

Je remercie Masse Critique Babelio et les Éditions Actes Sud pour ce privilège de lecture.

©Chantal Lafon

2 commentaires sur « Et vous passerez comme des vents fous »

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