Casablanca Circus

Yasmine Chami

Éditions Actes Sud

La case de Lahcène et les autres

Chérif et May ont fait leurs études à Paris et y sont restés. Mais à l’approche de la naissance de leur deuxième enfant, ils rentreront à Casablanca.

Lui est architecte, elle historienne.

Revenir au pays n’est pas un problème, chacun a une famille accueillante et présente.

Chérif va travailler sur un projet immobilier qui ne sera pas sans conséquence sur son couple.

« […] cette idée de transformer pas seulement le paysage urbain, mais les hommes eux-mêmes en concevant autrement les villes et les lieux… »

Une ambition peut-elle être humaniste ?

À Casablanca il y a le bidonville Karyane d’El Bahriyine, ces habitations conçues de bric et de broc abritent une population défavorisée.

Les habitants de ce bidonville sont riches de leur solidarité et de leur situation géographique, ils dominent l’océan et sont près du centre-ville. Tous vivent de petits boulots.

C’est un roman ethnographique qui interroge sur la marche du monde.

Les concepteurs de ce projet immobilier cherchent à se faire le maximum d’argent sous couvert de bonnes intentions, reloger les familles dans de meilleures conditions.

May raconte chaque jour son incursion dans le bidonville et les vies de ceux qu’elle rencontre, mais cela n’éveille aucun écho chez Chérif.

Meilleures, est-ce certain ? En effet le mot recasement revient souvent et dit tout. Il s’agit de déplacer cette population hors de la ville, sachant que cela les éloignera de toutes possibilités de vivre de petits boulots et de scolariser leurs enfants.

Chérif et May sont du bon côté de la barrière sociale, ils sont lettrés et ont une famille derrière eux.

May va vite éprouver un malaise grandissant et voir son mari sous un jour différent.

Les protagonistes de ce projet ne sont jamais aller à la rencontre de cette population, n’ont évidemment pas chercher à connaître leurs besoins réels. Plutôt raser les lieux et en faire une « vitrine » que d’améliorer l’existant en assainissant.

May va tenir un carnet de bord de sa grossesse car elle attend une fille.

Le lecteur va ainsi découvrir toutes les problématiques de la condition des femmes, ainsi que le travail qu’elle fait : écrire l’histoire de ce bidonville et des résidents.

Elle livre à l’enfant à naître ses inquiétudes sur ce monde qui a du mal à changer, ce patriarcat qui laissent les femmes au bord de la route. La femme est toujours coupable.

Ce retour au pays révèlera la faille de ce couple « moderne » qui avait tout pour réussir.

Si les jeunes ne changent pas le monde qui le fera ?

La lecture de ce livre ne peut que nous interpeller après le séisme qui a secoué le Maroc.

Il a été bien mis en évidence que la population la plus isolée a été la plus touchée et aussi la plus difficile à secourir.

Repenser le monde est-il possible ?

Ce livre est le chant de ceux qui résistent.

« Les mots portent leur poids de sueur et de larmes. »

Merci à Babelio et aux éditions Actes Sud pour cette lecture privilégiée.

©Chantal Lafon

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